Olivier1Patrouille des Glaciers : Performances sportives et gestion d’entreprise

La Patrouille des Glaciers est une course de ski-alpinisme, organisée par l’Armée Suisse, qui se déroule tous les deux ans. La course se fait en équipe de trois sur une distance de 51 km (110 km effort), un dénivelé positif de 3994 mètres et négatif de 4090 mètres. Hormis sa longueur, ce parcours reliant Zermatt- Verbier présente la particularité d’un encordement obligatoire pour la traversée du glacier à la montée comme à la descente, et le point culminant est « Tête Blanche » (à 3650 mètres d’altitude) tant redouté pour son froid. Olivier Drion, expert-comptable de 51 ans et sportif passionné a réalisé ce 20 avril 2016 le parcours Zermatt-Verbier avec son équipe en 9h05, terminant ainsi 2ème dans sa catégorie.

En dehors de ces expéditions sportives extrêmes, Olivier Drion est marié et père de deux enfants partageant la passion pour le sport. Il a exercé son activité d’expert-comptable au sein de son cabinet à Bruxelles avant de réaliser un rêve familial, celui de vivre à la montagne. Aujourd’hui Il partage son temps entre la Belgique et la Suisse où il remplit des missions dans le domaine financier et organise des ateliers de formation in et/ou outdoor alignant les énergies humaines et financières.

Voyons ensemble ce qu’Olivier nous raconte de cette aventure humaine ainsi que les parallèles qu’il fait avec la gestion d’entreprise

Pierre-Yves Hittelet

Même si le sport n’a pas toujours fait partie de ma vie, depuis maintenant presque 10 ans, je ne peux plus envisager une vie équilibrée sans la pratique d’une activité physique intense. J’ai d’ailleurs trouvé assez rapidement que le sport pouvait être un moyen très puissant de se découvrir et de découvrir des principes de vie qui peuvent également aider à développer une affaire ou une entreprise.

De cette magnifique expérience de la Patrouille des Glaciers, je tire 10 leçons que je mets en parallèle avec la vie de l’entreprise et que je voudrais partager avec vous :

1.     Se montrer tel qu’on est pour pouvoir travailler en toute confiance, partager ses forces et ses faiblesses, partager ses appréhensions, ses craintes.

Lors de cette édition, mon entrainement n’était pas, à mes yeux, suffisant et ma crainte était d’être le maillon faible de l’équipe, ce qui heureusement n’a pas été le cas.  Je suis souvent sujet aux crampes qui peuvent me paralyser instantanément. Ces appréhensions et craintes, j’ai voulu les partager avec mes co-équipiers. Les crampes ont d’ailleurs commencé à apparaitre au tiers de la course.  Auparavant, j’avais déjà essayé des cures de magnésium et toute sorte de choses mais en vain.  Cette fois-ci, mon épouse m’a remis à Arolla (moitié de la course) des pastilles de sel qu’il est recommandé de placer sous la langue, ce que j’ai essayé et qui s’est finalement avéré très efficace.

Le plus important pour moi a été de partager mes craintes avec mes co-équipiers. Ils étaient au courant de mes difficultés, des risques de défaillance, et ils les ont acceptés. Pour moi, c’était un soulagement, je ne devais plus leur cacher mes sentiments et nous pouvions aller de l’avant ensemble.

Dans l’entreprise, les collaborateurs doivent également pouvoir être pleinement eux-mêmes et partager en toute sincérité leurs ressentis. Contrairement à ce que l’on peut penser, cela n’est que bénéfique à long terme.

En période de crise, de peur de perdre leur job, certains se mettent en position défensive et se ferme aux autres, ce qui fait perdre beaucoup d’énergie à tout le monde.  L’attention n’est plus portée au projet commun et on n’avance plus.

Et vous, avez-vous déjà partagé avec vos collègues vos forces, vos faiblesses, vos ressentis et la vision que vous avez de votre entreprise ?

2.     Pas de compétition interne mais bien : entraide, bonne entente, dépasser son égo

Malgré toute la préparation et l’entrainement régulier, il faut pouvoir accepter que l’on peut être moins en forme le jour de la course. A ce moment-là, il faut accepter de s’entraider au sein de l’équipe.

Le plus fort à la descente ouvre le chemin ce qui permet aux autres d’anticiper les difficultés rencontrées ; le plus en forme à la montée donne le rythme et peut le cas échéant tirer à l’aide d’un élastique un des co-équipiers.  L’élastique ne tracte pas mais sert uniquement à conserver une distance et un rythme avec l’autre.

Le premier arrivé aux endroits de changement ou de ravitaillement aide le suivant.

Dépasser son égo, c’est être porté par l’énergie de l’équipe.

Dans l’entreprise, il est également primordial d’écouter les autres, de les valoriser et de ne pas s’approprier les idées d’autrui.

Einstein disait : « La vraie valeur d’un homme se détermine en examinant dans quelle mesure et dans quel sens il est parvenu à se libérer du moi. »

Et vous, dans votre entreprise, vous incite-t-on à faire des suggestions ? Vos idées ou propositions sont-elles prises en compte ? Si oui, vous sentez-vous valorisé ?

3.     Désir de se dépasser, être motivé, et travailler au bénéfice de l’équipe, bénéficier de la dynamique de groupe, si défaillance de l’un, le projet échoue…

Pendant cette course de la Patrouille des Glaciers, tous les risques (santé, casse de matériel, forme physique et mentale) sont multipliés par trois. De fait, si un membre de l’équipe a un pépin mécanique ou de santé, c’est tout le monde qui est affecté. Bien sûr, chacun donne le meilleur de lui-même toujours dans le respect de l’autre, car il ne veut pas décevoir l’équipe.

L’enthousiasme et le positivisme sont fondamentaux et contagieux.

 Il est donc important de comprendre l’impact que notre attitude a sur les gens qui nous entourent.

En entreprise, le salaire rend certes motivable, mais ce qui motive réellement, c’est la jouissance de réaliser la tâche qui nous incombe, et de participer à quelque chose qui nous dépasse.

Et vous, vous sentez-vous l’envie de vous dépasser et de participer à l’effort collectif ?

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4.     Objectifs clairs et partagés de tous

Même si cela paraît évident, il est essentiel d’avoir un objectif connu et commun à tout le monde. Pour nous, il s’agissait d’arriver sain et sauf à trois en un temps minimum. Nous avions bien sûr pris le temps d’en discuter et de nous mettre d’accord sur cet objectif. Un désaccord sur le ou les objectifs aurait considérablement affecté notre processus de décision à des moments où ne nous pouvions pas nous le permettre. Quand la pression du chrono est là et que les conditions sont dures, il faut pouvoir facilement se référer à notre objectif commun pour prendre les bonnes décisions.

Dans l’entreprise, connaitre son rôle et comprendre l’objectif est primordial.  Connaitre son rôle c’est être pleinement conscient de sa contribution dans le projet commun.

Et nul ne peut contribuer à la vie de l’entreprise au-delà du niveau de compréhension qu’il en a.

Et vous, vous sentez-vous suffisamment informé sur votre entreprise, sur votre rôle en son sein, et sa raison d’être ?

Participez-vous à l’élaboration des objectifs à atteindre ou ceux-ci vous sont-ils imposés ?

5.     Bonne préparation physique et mentale

Il va sans dire que la Patrouille des Glaciers demande une très bonne préparation mentale et physique. Il est bien sûr nécessaire de beaucoup courir plusieurs semaines avant, prendre le temps de se préparer mentalement aux différentes possibilités de la course. Quelques jours avant, prendre un temps de repos pour charger correctement les batteries et faire baisser la pression et le stress précédant le départ. Il faut également prendre le temps de s’acclimater à l’altitude vu que nous passons un cap à 3600m.

Il est rare de trouver des entreprises qui mettent en avant la nécessité d’être en forme physiquement pour être bien dans sa tête et performant. Des activités sportives sont parfois proposées sur le temps de midi, mais cela est loin d’être systématique et souvent, le simple fait de prendre du temps pour soi pour se ressourcer sur un temps de pause peut être très mal perçu par les collègues. Pourtant, les études le montrent, plus on est bien dans son corps, plus on est bien dans sa tête.

Et vous, dans votre entreprise, y a-t-il une possibilité de prendre soin de votre condition physique grâce à des temps de pause ou des lieux de ressourcement ?

6.     Capitaliser sur ses réussites

A chaque course, nous sommes notre propre cobaye, on se souviendra des expériences réussies passées et analyserons le moindre détail qui a Z10361029permis de courir dans les meilleurs conditions (ex : mental – alimentation – hydratation). Dans ce cas-ci, je sais que les pastilles de sel sont efficaces pour éviter les crampes.

Un projet réussi est u
n catalyseur pour la suite.  Il est donc essentiel d’en tirer les leçons, d’analyser tous les facteurs qui ont transformé un projet en une réussite et de tenter de se remettre dans ces conditions optimales dès la prochaine tentative.

Et dans votre entreprise, dressez-vous un bilan (autre que financier ?) à l’issue d’une expérience réussie ?

« Le succès laisse des traces après son passage » dit le coach américain Tony Robbins. Cela veut dire que certaines recettes de votre succès valent la peine d’être analysées pour être reproduites.

7.     Apprendre de ses erreurs et surtout les reconnaitre, se remettre en question

Lors de cette édition, la corde n’était pas préparée comme elle aurait dû l’être, de ce fait, elle est passée plusieurs fois en dessous des skis à la montée comme à la descente, on a pris la décision de ne pas remettre les peaux qui permettent une meilleure adhérence sous les skis avant la remontée vers le Col de Bertol et ainsi skater, c’est-à-dire faire des pas de patineur, ce qui a requis énormément d’énergie (inutile). Ces deux erreurs nous ont fait perdre un temps précieux, il est évident que l’on ne nous y reprendra plus !

« Pour surmonter les obstacles, il faut faire de chaque échec un tremplin, savoir tirer une leçon et avancer plus loin ».

Apprendre de ses erreurs peut être une méthode utilisée lors d’une formation-expérience.  On retient plus aisément les erreurs commises les ayant expérimentées.

Dans votre entreprise, vous sentez-vous condamnés par vos pairs si l’objectif n’est pas atteint ?

Avez-vous installé une culture de « lessons learned » ou rencontrez-vous les mêmes situations d’échec régulièrement en ayant l’impression d’un désagréable « déjà vu » ?

8.     Discipline, établir des règles à respecter coûte que coûte.

Rester en contact visuel de manière permanente sur une telle course est primordial car on perd facilement ses coéquipiers de vue.  De plus se faire distancer par ses coéquipiers lors d’un effort peut être très contreproductif et mettre en péril le résultat ou même la course dans son ensemble.

 Il faut dès lors respecter ses engagements, tenir ses promesses avoir la discipline nécessaire pour faire ce qu’il faut faire le moment venu.  Dans une entreprise comme celle-ci, on est un maillon de la chaîne, le travail d’autrui dépend du vôtre. Il y a un donc un engagement fort envers les autres membres de l’équipe et une nécessité de respecter cet engagement.

Et dans votre entreprise, est-ce que le respect de l’autre fait partie de votre culture, des valeurs de l’entreprise ?

Parfois, une culture du résultat à tout prix engendre une compétitivité qui met en péril la notion de collaboration et de respect des autres. Avez-vous une culture équilibrée entre respect et résultats ?

9.     Du matériel up to date

Pour une course d’une telle difficulté, nous avons besoin de nous équiper correctement. Concrètement, le matériel doit être à la fois très léger et très solide, ce qui est assez paradoxal ou en tout cas difficile à obtenir. Skis fartés (une semelle fartée permet de repousser la couche d’eau qui se forme lors de l’échauffement au contact du ski avec la neige), peaux imperméabilisées sont nécessaires afin d’éviter que la neige reste collée aux peaux et ainsi forme un sabot. Comme vous vous en rendez compte, nous ne pouvons rien laisser au hasard quant il s’agit de notre matériel.

Dans une entreprise, il faut également que les conditions matérielles soient satisfaisantes. Comme un salaire attractif par exemple, une formation out of the box, du matériel d’exploitation performant…

A vos yeux, votre entreprise investit-elle suffisamment dans le matériel nécessaire à une bonne exécution du travail ?

10.  Fêter ensemble l’accomplissement

AAEAAQAAAAAAAAmBAAAAJDhkOTUxNmFkLWM0MGUtNDViYS04NDAwLWMxYWNlMDEwODhlOQMon expérience est qu’il est préférable de voir cette réussite de la Patrouille des Glaciers comme une réussite collective. Les émotions ressenties sont d’autant plus intenses et durables que si j’avais vu ce résultat comme une victoire personnelle.

Evidemment, travailler en équipe apporte son lot de frustration et de défis, mais gagner ensemble vaut largement le dépassement de ces difficultés de collaboration. Chacun a apporté ses forces et ses faiblesses et ensemble nous avons réussi.

Et vous, quand vous réussissez un projet, décrochez un nouveau contrat, un nouveau client, partagez-vous vos émotions avec les autres membres de votre équipe ? Prenez-vous le temps de fêter cette réussite ensemble ?

En guise de conclusion, je reprends cette citation de Zig Ziglar :

« C’est votre attitude et non votre aptitude qui déterminera votre altitude »

La Patrouille des Glaciers est une course magnifique, intense qui nous a permis de nous surpasser ensemble, dans le respect de chacun.

Et les leçons que j’en tire sont de précieux trésors qui me servent dans ma vie privée et professionnelle.

J’espère qu’ils vous inspirent et vous aident également…

Olivier Drion

Olivier Drion organise des ateliers in et/ou outdoor (rencontre avec la nature et randonnées à skis ou à pieds, pour tous niveaux…) adressés aux entreprises.

Ces ateliers pragmatiques s’articulent autour de deux thèmes :

  1. Ré-humaniser, redonner du sens, impliquer, motiver, dynamiser, enthousiasmer les membres d’une équipe ou d’une entreprise
  2. Tirer profit des différences intergénérationnelles

Pour contactez Olivier Drion Tél : + 32 (0)2 888 70 33 Tél : + 41 (0)79 846 36 06 olivier@performanceinaction.biz www.performanceinaction.biz

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